Avril 2025

Note concernant la transposition de la Directive UE établissant le nouveau système d’échange de quotas d’émission dénommé ‘ETS2’

L’ANODE et l’AFIEG tiennent à remercier le travail d’accompagnement de la part de la DGEC dans l’élaboration des plans de surveillance et des rapports d’émissions devant être remis d’ici le 31 mars. Les efforts déployés en matière de pédagogie, que ce soit à travers les échanges directs ou les webinaires, ont été grandement appréciés par l’ensemble des fournisseurs. Nous remercions également la DGEC pour l’échange tenu le jeudi 19 décembre, qui a permis d’aborder de nombreux sujets importants, notamment la nécessité d’inscrire dans la loi de transposition le droit pour les fournisseurs de gaz de répercuter les coûts relatifs au système d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre (ETS2) dans leurs prix, notamment lorsque les conditions générales ou spécifiques de vente le prévoient, quelles que soit le type d’offre.

I) Nécessité d’une transposition claire dans la loi française des dispositions de la directive ETS sur la répercussion de l’ETS2 aux consommateurs

La directive européenne 2023/959 (ci-dessous, « Directive ETS2 ») établit clairement que l’objectif principal de l’extension du système d’échange de quotas d’émission aux secteurs des bâtiments et des transports routiers est de fournir un signal prix fort et sans ambiguïté aux consommateurs, les incitant à décarboner leur consommation énergétique.

En effet le considérant 89 de la Directive ETS2 indique :

« La transparence quant aux coûts du carbone et à la mesure dans laquelle ceux-ci sont répercutés sur les consommateurs revêt une importance cruciale pour permettre des réductions d’émissions rapides et économiquement rentables dans tous les secteurs de l’économie. »

De plus, le considérant 90 poursuit :

« Il convient de prendre des mesures pour parer au risque potentiel de hausses excessives de prix qui, s’il est particulièrement élevé au démarrage du nouveau système d’échange de quotas d’émission, risque d’ébranler la volonté des ménages et des particuliers d’investir dans la réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre. »

C’est justement dans l’optique de surveiller l’impact de l’ETS2 sur la dépense énergétique des consommateurs finaux que le paragraphe 3 de l’article 30 septies de la Directive ETS2 prévoit que :

« À compter du 1er janvier 2028, les États membres veillent à ce que, au plus tard le 30 avril de chaque année jusqu’en 2030, chaque entité réglementée déclare la part moyenne des coûts liés à la restitution des quotas en vertu du présent chapitre qu’elle a répercutée sur les consommateurs pour l’année précédente ».

Ainsi, bien que la répercussion aux consommateurs finals soit l’esprit de la directive, aucun texte législatif ou règlementaire ne l’autorise explicitement. Cette absence de fondement en droit français pourrait être à l’origine de contestations de la part des consommateurs finals.

Même si cette évolution législative était prévue dans les CGV ou CPV, cela exposerait les fournisseurs à des réclamations voire des impayés de clients ne souhaitant pas s’acquitter de leur coût carbone calculés à partir de leurs consommations de gaz – et donc de leurs émissions.

⇨ Dans ces conditions, une transposition précise de la Directive ETS2 qui explicite le droit des fournisseurs de transférer les coûts correspondants aux clients, quelle que soit le type d’offre et la date de signature, apporterait une sécurité juridique nécessaire et garantirait une compréhension commune entre les fournisseurs, l’administration et les clients.

II) Besoin d’une transposition rapide

Les fournisseurs signent d’ores et déjà des contrats de fourniture pluriannuels dont une partie des consommations sera facturée en 2027, et donc couvertes par l’ETS2, sans pour autant pouvoir intégrer de manière incontestable au moment de la souscription le principe de facturation de cette obligation, faute de transposition française.

Si les offres indexées sur le prix repère de vente du gaz (PRVG) de la CRE devraient pouvoir automatiquement évoluer au 1er janvier 2027, dès lors que l’indice intègrera cette nouvelle obligation, ce ne sera pas le cas des offres à prix fixe. Or ces offres, comme le souligne la CRE dans son dernier rapport sur le fonctionnement du marché de détail, constituent la majorité des offres de marché signées autant sur le segment des particuliers (57 %) que sur celui des petits professionnels (66 %) plébiscitées pour le fait de « garantir la protection durable des consommateurs contre la volatilité des prix».

Pour ces offres, conformément à l’article L442-1 du code de l’énergie, les fournisseurs pourront faire évoluer le prix pour tenir compte de cette composante de prix à condition de prévoir une telle clause dans les CGV ou CPV et de respecter les délais de prévenance.

Cette approche a été reprise dans les lignes directrices de la CRE publiées postérieurement à toutes les autres dispositions existantes, mais cette répercussion est impossible pour les offres à prix fixe tout compris. Pendant toute la période d’engagement du fournisseur, le prix ne peut être modifié que pour tenir compte des évolutions de la fiscalité applicable. Or, les articles 1591 et 1163 du Code civil et l’article L111-1 du Code de la consommation prévoient que le prix est un élément essentiel du contrat de fourniture et doit être déterminé ou déterminable afin d’éviter la nullité de celui-ci.

Dès lors, sans transposition française, les fournisseurs ne peuvent pas anticiper une brique de coût carbone « ETS2 » à intégrer dans le prix de leurs offres à prix fixe tout compris pour l’entrée en vigueur du mécanisme.

⇨ Une transposition rapide est nécessaire pour avoir de la visibilité sur la répercussion auprès des clients et limiter autant que faire se peut le nombre de contrats en offre à prix fixe tout compris qui seront signés antérieurement. Dans le cas contraire, les fournisseurs pourraient être contraints, afin de limiter le risque, de ne plus commercialiser ce type d’offres pourtant appréciées des consommateurs pour l’assurance et la stabilité de prix.

 

Proposition de transposition dans le code de l’énergie :

Au titre IV du livre IV de la partie législative du code de l’énergie,ajout d’un chapitre IX « Dispositions générales relatives au système d’échange de quotas d’émissions de l’Union européenne pour les bâtiments, le transport routier et autres secteurs »

Ajout d’un article L449-1

Les fournisseurs de gaz naturel visés à l’article L443-4 répercutent un coût carbone défini à l’article L449-2 dans leurs prix de fourniture de gaz naturel pour les consommations facturées à compter du 1er janvier 2027.

Le premier alinéa ne s’applique pas à la fourniture de gaz naturel aux consommateurs suivants :

  1. Installations soumises à autorisation pour les émissions de gaz à effet de serre listées dans l’arrêté du 10 décembre 2021 ;
  2. Exploitants d’aéronef et compagnies maritimes visés à l’article L229-5 du code de l’environnement ;
  3. Chefs d’exploitation agricole tel que défini à l’article L311-2 du code rural et de la pêche maritime.

Ajout d’un article L449-2

Le coût carbone correspond aux coûts liés à l’acquisition et à la restitution des quotas correspondant à la quantité de gaz naturel mis à la consommation dans les secteurs visés à l’Annexe III de la Directive 2003/87/CE ainsi que les frais de gestion afférents à cette acquisition.

Ajout d’un article L449-3

Au plus tard le 30 avril de chaque année, chaque fournisseur de gaz naturel déclare la part moyenne des coûts carbone qu’il a répercutée aux consommateurs pour l’année précédente au ministère de l’énergie. Cette disposition prend fin à compter du 1er mai 2030.