Novembre 2021

Le 14 juillet dernier, la Commission européenne a publié 12 projets de textes qui font partie intégrante de la politique du Pacte vert pour l’Europe. Ils s’inscrivent tous dans la volonté de l’Europe de décarboner son économie tout en protégeant les entreprises et les consommateurs européens. Parmi ces douze textes, 6 sont porteurs de mesures ambitieuses qui concerneront particulièrement les consommateurs européens.

Taxe carbone aux frontières

La taxe carbone aux frontières a pour objet de rétablir une situation de juste concurrence entre les entreprises européennes d’une part, qui sont soumises à une stricte réglementation environnementale et à l’obligation d’achat de permis de polluer, d’autre part les entreprises étrangères. La situation actuelle engendre en effet une distorsion de concurrence : les entreprises étrangères sont avantagées par des coûts de production plus faibles, provoquant ainsi des « fuites de carbone », c’est-à-dire des émissions de carbone non taxées dues aux produits et services importées. Les importateurs concernés sans les producteurs d’électricité, de fer et d’acier, d’aluminium, de ciment et d’engrais, qui sont des gros émetteurs soumis à l’EU ETS pour les entreprises européennes et très exposés au commerce international.

Les prix seront corrélés à ceux fixés sur le marché du carbone. Ces prix (et donc les recettes du CBAM) seront très faibles tant que les producteurs européens concernés continuent à recevoir des quotas gratuits sur l’EU ETS (jusqu’en 2036). Les revenus générés iront principalement au budget européen (et couvriront les coûts de fonctionnement du CBAM).

Ce texte, soutenu de longue date par la France, devrait faire l’objet d’une attention particulière lors de la présidence française de l’Union Européenne, de janvier à juillet 2022.

Révision de la directive efficacité énergétique

Le texte vise à réduire la réduction de la consommation énergétique européenne selon une approche transversale avant d’encourager les énergies propres. A ce stade, il prévoit un objectif contraignant et collectif de réduction de la consommation à 9% en 2030 par rapport au scénario de référence de 2020. Il augmente aussi les objectifs annuels de réduction sur la période 2024-2030 (de 0,8 à 1,5%) et renforce les obligations de mise en place de mesures à destination des consommateurs vulnérables. Il introduit par ailleurs une contribution spécifique pour le secteur public de -1,7% de consommation finale.

Révision de la directive énergie renouvelable (RED III)

La directive relève les objectifs d’installation d’énergies renouvelables en Europe. L’objectif contraignant de 32% d’ENR en 2030 est rehaussé à 40%. Des objectifs sectoriels contraignants sont fixés, notamment 1,1% d’augmentation annuelle d’intégration d’ENR pour le chauffage et le refroidissement. Elle prévoit une extension du système de certification à tous les carburants renouvelables (RFNBO : Renewable fuels of non-biological origin), dont l’hydrogène vert, et une fixation de sous-objectifs d’intégration d’hydrogène renouvelable.

Révision de la directive sur le marché carbone

La proposition de la Commission, qui s’inscrit dans la suite de la révision de 2018 pour la période 2021-2030, prévoit une accélération de la diminution des quotas d’émissions (-4,2% par an au lieu de -2,2%) ainsi qu’une accélération de la diminution (mais pas une suppression) des quotas distribués gratuitement aux industries exposées aux fuites de carbones. Bruxelles prévoit aussi d’étendre le système au secteur maritime et à l’aviation hors UE et prévoit un second système de quotas pour le transport routier et le bâtiment.

Révision de la directive sur la taxation de l’énergie

Ce texte, qui devra être adopté à l’unanimité puisqu’il touche à la fiscalité, vise à corriger la fiscalité actuelle, accusée de favoriser les énergies fossiles, et à harmoniser les taux nationaux, qui divergent fortement d’un pays à l’autre. En substance, le nouveau système prévoit quatre catégories de taux (de 0,15€/gigajoule à 10,75€/gigajoule suivant le caractère polluant des carburants), avec une taxation non plus le volume mais le contenu énergétique et sur la performance environnementale. Ces taux seront indexés sur l’inflation et mis à jour annuellement. Les carburants aériens et maritimes seront touchés par cette réglementation, après une période de transition de dix ans. Enfin, le texte restreint la possibilité d’exonérations fiscales à l’échelle nationale qui restent toutefois possibles dans plusieurs secteurs, notamment les secteurs les énergies les plus propres.Il est à noter que quatre autres textes, dont une proposition législative « Réduire les émissions de méthane dans le secteur de l’énergie » et une révision du Troisième paquet énergie pour le gaz, sont attendus le 14 décembre 2021.

A cette occasion, l’AFIEG, ainsi que l’association européenne des fournisseurs d’énergie (European Energy Retailers) estiment impératif de revoir la question du risque d’impayés qui pèse sur les fournisseurs. En effet, les fournisseurs sont considérés comme redevables des accises (TICFE, TICGN) pourtant payées par les consommateurs. Ils jouent le rôle de collecteurs, sans aucune compensation financière. En cas de défaut d’un consommateur, le fournisseur supporte la partie impayée liées aux accises, ce qui peut gravement fragiliser sa situation financière. Comme pour la TVA, nous appelons à ce que soit mis en place un droit pour le fournisseur de prélever un pourcentage sur la taxe liée à sa gestion, comme le suggérait la Commission des affaires économiques du Sénat dans son rapport n°535 déposé le 17 juin 2020.